Bastien Hugues (lefigaro.fr) 11/12/2009
Trois clichés authentiques, pris clandestinement par un sous-officier allemand, ont été rendus publics cette semaine. Des images uniques prises au Mont Valérien, le 21 février 1944.
Ils sont là. Cloarec, Alfonso, Ramjan, Salvadori et les autres. Mains attachées aux poteaux, yeux bandés, au pied d’une falaise boisée, face à leurs bourreaux. Ils viennent d’être exécutés ou vont l’être d’un instant à l’autre.
Clemens Rüther, lui, est un sous-officier de la Wehrmacht. Ce jour-là, le 21 février 1944, il les a convoyés ici, au Mont Valérien, devant le peloton d’exécution. Puis s’est reculé en surplomb de la clairière. Pour veiller à la sécurité du site, ou pour se cacher. Seule l’histoire le sait. Une chose est sûre, clandestinement, il a décidé de fixer son objectif vers les condamnés. Des patriotes – la plupart étrangers – du célèbre réseau de Missak Manouchian, l’une des composantes des Francs-tireurs et partisans de la Main-d’oeuvre immigrée (FTP-MOI), d’obédience communiste.
Ses photographies, Rüther les garde pour lui et pour lui seul jusqu’en 1985, avant de les transmettre au comité allemand Franz Stock, du nom de l’aumônier militaire présent au côté des condamnés. En 2003, les images sont transmises à l’Etablissement photographiques des archives de la défense (Ecpad), où personne ne semble réaliser immédiatement la valeur de ces documents. Mais il y a quelques mois, Serge Klarsfeld, fondateur de l’association des fils et filles des déportés juifs de France, apprend leur existence, dans le cadre de ses recherches sur l’identification des quelque 1.000 fusillés du Mont Valérien entre 1941 et 1944.
Des photographies rendues publiques cette semaine par Serge Klarsfeld, avant la célébration dimanche du 68ème anniversaire de la première exécution massive au Mont-Valérien, le 15 décembre 1941, au cours de laquelle furent fusillés 70 résistants ou opposants à l’occupant allemand, dont 52 juifs.